dimanche 22 septembre 2013

Le Worldshaker – R.Harland – 368 p. - Hélium – 2010 – 15.20 €

 
Ce livre est un roman steampunk endiablé ! Dans un autre monde, la Terre est désertée. La majorité de la population mondiale est réfugiée sur d’immenses navires-nations. Sur le Worldshaker, l’empire britannique vit depuis plusieurs centaines d’années. Ce bateau abrite plus de 12 000 habitants. Les 53 ponts sont divisés en castes. Le poste de commandement et les nobles vivent dans les niveaux supérieurs. Les commerçants et les artisans sont regroupés sur les quelques niveaux au dessus du niveau de la mer. Les cales du navire emprisonnent les Immondes, êtres mystérieux qui alimentent en charbon les nombreuses chaudières. Sur ce paquebot gigantesque construit en 1845, l’histoire s’est arrêtée au XIXème siècle. La Reine et le Prince consort officient comme à la Cour d’Angleterre. Le thé est servi à 17h. Les riches prospèrent et se reçoivent dans leurs salons. Ils sont servis par des Larbins exploités jusqu’à leur dernier souffle. Cette autorité royale n’est qu’un gouvernement de façade car le seul et véritable maître à bord est le commandant Sir Mormus Porpentine. Il détient les clés de la salle des machines. Le roman commence par le choix de Sir Mormus pour sa succession : son petit-fils : Colbert Porpentine. Colbert est un jeune homme de 16 ans. Studieux, discipliné, il est l’enfant prodige de cette famille très influente. Une nuit, il est réveillé par un bruit dans sa cabine. Il entend des pas pressés et des cris dans la coursive. Une patrouille frappe à sa porte. Les soldats sont inquiets car une Immonde a réussi à s’échapper de la salle de transformation. Elle se cache dans les méandres des ponts supérieurs. Colbert se recouche et se demandant ou se trouve cette salle de transformation et quelle est son utilité … En se rendormant, il se rappelle que ce qui l’a réveillé n’est pas le bruit des soldats mais un bruissement beaucoup plus proche. Son cœur s’affole. Il saute de son lit et soulève sa courtepointe : deux grands yeux l’observent. L’Immonde est là, à quelques centimètres de lui. Colbert a peur. Il ne connaît rien de ces êtres vils. L’Immonde le supplie de le cacher afin d’échapper aux soldats, aux matraques et à la mystérieuse chambre de transformation. Le jeune Col est abasourdi, en quelques secondes, il apprend que les Immondes semblent humains, qu’ils parlent et qu’ils sont sexués. Vêtue de haillons, Col devine que l’Immonde est une jeune femme de son âge ou presque. Elle est vive et athlétique. Ses grands yeux expressifs subjuguent Colbert qui reste planté aux pieds de son lit. La jeune femme en profite pour se cacher dans l’armoire en entendant les pas des soldats qui se rapprochent … Les 368 pages, de ce roman, contiennent tout un monde, toute une nation et toute une histoire. Le Worldshaker va dévoiler d’horribles secrets, une belle histoire d’amour, un mariage, une révolution. Ce bateau porte bien son nom même s’il est destiné à en changer pour devenir le Liberator. Les personnages de Colbert et Riff sont touchants, particulièrement Riff l’indomptable et la combattante hors-pair. Les personnages mineurs, la grande sœur Gillabeth et Antrobus le petit frère de Colbert se révèlent tout au long du récit. Le Mégalonef est personnifié, il semble vivre au rythme trépidant des révoltes et secrets de ses habitants. Ce roman est accompagné de plan et d’un descriptif détaillé du navire. Cette histoire en huis-clos rappelle l’album Golden City et Méto. Les conditions de vie des Larbins et des Immondes ne pourront qu’interroger le lecteur sur notre propre époque et l’actuelle situation mondiale. J’ai apprécié la réflexion sur la vie des femmes et l’inévitable cantonnement de ces dernières à des rôles de mère et d’épouse : la situation n’aurait-elle pas changé depuis 1845 ? Je félicite les éditions Hélium pour le design et la présentation graphique de cet excellent roman. Dès 11 ans pour les « gros » lecteurs.